Les producteurs du Sud à l’épreuve du COVID-19

La crise sanitaire touche le monde entier. De nombreux pays de l’hémisphère Sud, dont les populations sont parmi les plus vulnérables, et qui produisent les denrées alimentaires dont nous dépendons majoritairement, subissent de plein fouet les conséquences à tous les niveaux.

Les organisations du mouvement international ainsi que les organisations de producteur.rice.s certifiées Fairtrade/Max Havelaar se mobilisent tous les jours et ont mis en place des mesures afin d’aider les producteur.rice.s à affronter cette épidémie.

Les conséquences de la crise COVID-19 dans les pays du Sud

Chaque pays et chaque filière subit la crise différemment mais les risques et certaines conséquences restent similaires pour tous et toutes :

En premier lieu, il existe un très important risque pour la santé des producteurs et des travailleurs, directement lié à l’épidémie et à l’engorgement des structures de santé, qui sont déjà peu robustes dans la plupart des pays producteurs.

Des conséquences économiques et de sécurité alimentaire font partie des risques à venir, liées au ralentissement de l’activité suite aux mesures de fermeture ou de quarantaine prises par les différents gouvernements, mais aussi aux problèmes de logistique dans les chaines d’approvisionnement, à la hausse de coûts de production (main d’œuvre plus rare et plus chère, transports, nourriture) et aux pertes d’emploi, ainsi qu’au défaut de remboursement des prêts bancaires par les producteurs, les coopératives, et les plantations.

Dans les filières les plus touchées (fleurs et thé), les travailleur.euse.s se trouvent déjà dans un état de grande vulnérabilité, et ne bénéficieraient d’aucune protection sociale ni maintien de salaire en cas de perte d’emploi.

Dans la conjoncture actuelle, des risques en matière de violation des droits humains sont accrus. La baisse des exportations s’accompagne de licenciements  et si les offres d’emploi se font rares ou que les revenus diminuent, les agriculteur.rice.s ou les travailleur.euse.s pourraient être enclin à accepter des conditions de travail délétères  et précaires.

L’état des lieux  des filières aujourd’hui

Dans les fermes qui produisent des fleurs, ce sont environ 66 000 travailleur.euse.s potentiellement touchés, qui, à la suite de la baisse drastique de la demande mondiale, ont dû détruire des lots entiers de fleurs avec une perte comprise entre 1,8 et 2,2 milliards d'euros au mois de mars.  Le Kenya et l'Éthiopie, les deux principaux pays producteurs, ont subi une réduction d'environ 70% à 80% de leurs ventes, ainsi que des coûts liés à la destruction des fleurs invendues et des prêts bancaires en défaut.

Concernant la production de thé, en Inde (Assam, Darjeeling, Nilgiris) et au Sri Lanka, la plupart des plantations ont stoppé leur activité suite à la fermeture du pays par le gouvernement. En Afrique (Kenya et Ouganda), les plantations auront des difficultés à stocker la production de thé suite aux annulations et/ou reports des ventes aux enchères à travers le monde.

Dans la majorité des pays producteurs de bananes équitables, des dérogations ont été acceptées afin que les producteur.rice.s continuent de travailler, en prenant des mesures préventives et de protection. Les exportations se poursuivent normalement, mais les coûts de production risquent d’augmenter pour les producteurs car ils doivent investir et mettre en place des mesures telles que l’utilisation de masques, de gants, de savons antibactériens, des transports supplémentaires pour emmener les travailleur.euse.s aux différentes zones de travail pour assurer une distance sociale dans les bus. Ils font également face à des problèmes logistiques pour déplacer les fournitures.

Dans les organisations de producteurs de coton, la récolte a déjà été effectuée, mais les prévisions de décroissance de l’industrie de la mode et du textile font craindre une importante baisse de l’activité pour les mois à venir. Le fait que le coton soit un produit stockable reste un filet de sécurité.

Les producteurs de cacao et de café ont pour la plupart déjà effectué leur récoltes et vendu leur production (notamment le cacao en Afrique de l’Ouest), et n’ont donc pas encore été touchés de manière directe, concernant les ventes. En revanche, l’incertitude quant à la capacité des intermédiaires à exporter les produits (manque de main d’œuvre, limites logistiques, interdiction des navires chinois dans les ports africains, quarantaine de 14 jours décrétée dans certains ports, notamment au Cameroun, Ghana et Sénégal) et quant à une volatilité accrue des prix internationaux, comme le démontre la baisse de 25% des prix du cacao depuis de début de la pandémie.

Le commerce équitable est une source d’espoir et de solidarité

Les difficultés, les risques et les défis sont et seront immenses durant cette période, mais le commerce équitable joue pleinement son rôle de filet de sécurité et de réseau basé sur la solidarité et l’entraide.

Les réseaux de producteurs ont mis en place dans les différents pays des campagnes d’information et de formation sur les mesures de prévention du COVID-19 afin de limiter la propagation. La sensibilisation est une condition sine qua non pour empêcher la contamination. Les informations sur le virus sont traduites dans les langues locales et transmises aux agriculteur.rice.s et aux travailleur.euse.s. Ceci est également important pour empêcher la saturation des systèmes de santé publique, souvent fragiles des pays du Sud,  si le virus se propage comme cela s'est produit dans d'autres régions du monde. La prime de développement Fairtrade/Max Havelaar est d’ores et déjà utilisée pour lutter contre l’épidémie. Elle sert par exemple à financer  des masques et gants de protection, des produits de nettoyage, notamment les produits de désinfection mais également pour financer les achats de première nécessité en l’absence de rémunération.

En Équateur et en Colombie, les producteur.rice.s de bananes équitables offrent leurs invendus aux communautés dans le besoin qui ne peuvent plus aller travailler du fait du confinement et n’ont plus aucun revenu pour se nourrir.   Au Pakistan, les producteur.rice.s de ballons de sport se sont mis à la confection de masques, qu’ils distribuent parmi la population. En Afrique du Sud, les viticulteurs mettent à la disposition de leurs travailleur.euse.s des produits de désinfection.

Le mouvement international Fairtrade/Max Havelaar se mobilise tous les jours pour aider des milliers de personnes à faire face à cette crise exceptionnelle et espère en sortir plus forts !