Surtout quand il ne rémunère pas correctement les producteurs !

En France, nous consommons en moyenne 13,2 kg de chocolat par foyer et par an[1], soit plus d’une tablette par semaine. Or, le prix payé aux cacaoculteurs et cacaocultrices ne pèse que 11% du coût total d’une tablette de chocolat[2]. Ce plaisir bénéficie ainsi principalement aux négociants de cacao et aux grandes marques de chocolat, au détriment de celles et ceux qui produisent le cacao et de l’environnement.  

La pauvreté endémique de la grande majorité des producteurs et productrices de cacao est à la racine de tous les maux socio-économiques et environnementaux de la filière : déforestation, travail des enfants, appauvrissement des sols, destruction de la biodiversité, abandon de la culture cacaoyère.

Les entreprises du secteur et les pouvoirs publics doivent agir et répondre aux attentes des producteurs d'atteindre un revenu vital[3], clé de voûte d’une filière durable et d’un chocolat respectueux des droits humains et de la planète. 

La production actuelle du cacao « tache » sérieusement nos valeurs :

  • 95 % du chocolat vendu ne garantit pas un minimum vital à celles et ceux qui cultivent le cacao. Plus de la moitié des producteurs ivoiriens vit avec moins de 1,2 $ par jour soit 36 € par mois[4] ;
  • La majeure partie est issue du travail d’enfants. Ils sont environ 1,5 million à travailler dans les cacaoyères du Ghana et de la Côte d’Ivoire[5] ;
  • Les 2/3 de notre chocolat sont potentiellement issus de la déforestation. Ces dernières décennies 70 % des forêts du Ghana et de la Côte d’Ivoire ont été détruites[6].

Les cacaoculteurs revendiquent le droit à un revenu vital

Le 11 mai 2023, des organisations de producteurs et productrices d’Afrique de l’Ouest ont organisé un Sommet sur le revenu décent dans le secteur du cacao qui a rassemblé une centaine de représentants de l’industrie, des gouvernements producteurs et consommateurs, pour débattre des moyens de garantir que la filière assure un revenu vital à celles et ceux qui produisent le cacao.

À l’agenda : comment mettre en place de bonnes pratiques agricoles, instaurer des pratiques d’achat responsables et créer un environnement politique favorable au revenu vital dans le secteur du cacao.  

En conclusion, les producteurs et productrices ont formulé des demandes très claires adressées aux acteurs du secteur et aux autorités publiques pour une filière du cacao durable qui rémunère décemment les premiers maillons de la chaine.

Les attentes des cacaoculteurs et cacaocultrices[7] : 

  • A l’industriedu chocolat : des pratiques d’achat responsables avec des contrats long terme, des prix qui couvrent les coûts de production durable et garantissent un revenu vital, un partage de la responsabilité dans la transition écologique. 
  • Aux pouvoirs publics des pays consommateurs : intégrer les enjeux de rémunération vitale dans la législation nationale et européenne comme critère de vigilance des entreprises, légiférer sur les prix d’achat qui intègrent les coûts de production durable.  
  • Aux initiatives volontaires pour un cacao durable : intégrer les producteur·rice·s dans les discussions pour cocréer des programmes efficaces, renforcer la coopération internationale pour optimiser l'impact, créer un cadre favorable pour des pratiques d'achat responsables et des prix durables.  

Les ONGs se joignent aux cacaoculteurs et cacaocultrices pour un revenu vital 

Le 1er octobre, journée internationale du cacao, est l’occasion d’interpeller l’industrie du chocolat et les pouvoirs publics pour qu’ils prennent les mesures nécessaires et urgentes afin de garantir des prix justes et un revenu vital à celles et ceux qui produisent le cacao, et leur permettre d'investir dans des techniques de production pour régénérer la fertilité des sols et lutter contre la déforestation.  

Intervenants : 

En savoir plus sur les enjeux de la filières cacao

Parmi les près de 2 millions de cacaoculteurs et cacaocultrices en Côte d’Ivoire et au Ghana, les deux premiers pays producteurs mondiaux, jusqu’à 90% ne touchent pas un revenu vital[8]. De la cacaoyère au supermarché, la valeur ajoutée produite par la transformation de la fève de cacao en tablette de chocolat échappe largement à ceux et celles qui la produisent, qui est captée à 80% par les transformateurs, fabricants et distributeurs[2].  

D’après l’ONG Oxfam, l’industrie du chocolat a engrangé des profits en hausse ces dernières années, tandis que dans un même temps, les revenus des producteurs, et notamment ceux des productrices, ont baissé significativement, en raison de prix payé aux producteurs trop bas pour faire face à l’augmentation des coûts de production et aux conséquences du réchauffement climatique. Ainsi, les quatre plus grands fabricants de chocolat mondiaux ont généré conjointement près de 15 milliards de dollars de profits grâce à leurs divisions confiserie depuis 2020, soit une hausse moyenne de 16 %. Les producteurs et productrices de cacao interrogées dans le cadre de l’enquête d’Oxfam au Ghana, ont vu leurs revenus chuter en moyenne d’autant, et neuf sur dix affirment avoir vu leur niveau de vie se dégrader depuis la pandémie de Covid-19 en 2020[9].  

Or sans un revenu vital la majorité des producteurs et productrices de cacao n’est pas en mesure de mettre en place des pratiques agricoles durables, d'investir dans des techniques de production pour régénérer la fertilité des sols et de lutter contre la déforestation. 

La déforestation, conséquence de l’expansion galopante de la production cacaoyère 

L’augmentation de la consommation de chocolat mondiale depuis les années 80 a été l’un des principaux facteurs du développement rapide de la culture cacaoyère en Afrique de l’Ouest et en Amérique latine, rendant la filière partiellement responsable d’une grande partie de la déforestation pour augmenter les surfaces dédiées à la production de cacao. Pour exemple, le couvert forestier de la Côte d’Ivoire a diminué d’environ 90% au cours des 60 dernières années[10], principalement à cause de l’agriculture – environ 45% de cette déforestation peut être imputée à la culture du cacao[11].   

Si l’adoption par l’Union européenne d’un règlement zéro déforestation sur sept commodités d’importation (cacao, café, caoutchouc, huile de palme, soja, bœuf et bois) et leurs produits dérivés est un grand pas vers la redevabilité des entreprises, en demandant une preuve de non déforestation pour les produits commercialisés sur le territoire de l’Union européenne, sa mise en application d’ici 2025 risque de faire porter la charge et les coûts de mise en conformité aux producteurs et productrices de petites exploitations.  

Le travail des enfants reste une pratique répandue dans la culture cacaoyère 

En Côte d’Ivoire et au Ghana, on comptabilise environ 1,5 million qui travaillent dans les exploitations de cacao[12]. 95 % d’entre eux sont exposés aux pires formes de travail des enfants, c’est-à-dire qu’ils participent à des activités dangereuses telles que définies par les lois nationales (défrichage, utilisation d’outils tranchants, longs horaires, exposition directe et sans protection à des pesticides). La majorité de ces enfants est exposée à plus d’une forme de travail dangereux. Or, dans un contexte de précarité extrême, le travail des enfants n’est pas un choix ou une aide ponctuelle familiale mais une nécessité pour se nourrir.  

Choisir du chocolat équitable c'est déjà agir.


Sources :